¤ Révision de la directive travailleurs détachés, une chausse-trappe chasse l’autre ?
Dernière ligne droite pour les ministres de l’Union européenne (UE).
Apres un vote positif du Parlement européen (en commission de l’emploi et des affaires sociales) le lundi 16 octobre 2017, un vote du Conseil de l’Union européenne (ministres de l’Emploi des Vingt-Huit Etats membres de l’Union) le 23 et un vote du Parlement européen le 26 octobre 2017 doivent en effet intervenir et préciser la teneur du futur texte.
La commissaire européenne concernée, Marianne Thyssen, commissaire européenne à l’Emploi et aux Affaires sociales, indique ce matin (in ‘On n’arrête pas l’éco », Florence Bensaid, sur la radio francaise de service public France Inter) que sur certains points la négociation, réouverte suite aux « changements politiques intervenus en France » (comprendre l’élection présidentielle qui a porté Emmanuel Macron au pouvoir en France pour 5 ans le 7 mai dernier et la décision de ce dernier, en juin, de s’opposer à l’accord qui était en vue, estimant qu’il n’allait pas assez loin, au risque de braquer certains pays, notamment ceux de l’ancien bloc soviétique) à permis d’avancer.
On notera que Mme Thyssen indique que ce qui se profile dans le nouvel accord, c’est l’égalité de rémunération du travailleur détaché avec les travailleurs du pays d’accueil. Et de citer le cas d’un travailleur étranger détaché en France.
Mais pas la réciproque. Qui pourtant sera tout autant vraie. Je vous laisse imaginer le gain potentiel que cela promet pour une entreprise française, qui pourra « proposer » à ses salariés dont elle prévoit de délocaliser l’usine en Bulgarie de suivre le mouvement, au prix du marché du travail bulgare. Où comment disposer de main d’oeuvre formée à l’Ouest, avec les deniers publics du contribuable de l’Ouest, payée aux prix de marché quatre à cinq fois moindre, voire encore moins, qu’à l’Ouest et ce, en toute conformité avec les réglementations européennes et nationales.
Évidemment, seules les plus grosses entités industrielles et de service pourront exploiter ce filon, d’où l’accent mis sur l’assouplissement des règles pour les petites et moyennes entreprises en France, puisqu’au final c’est sur elles et sur leur salariat que pèsera la majeure parie des charges induites par ce système.
Espérons que sous la directive ainsi révisée, on n’assistera pas à une inversion massive de la tendance qui pousse actuellement les entreprises du bloc de l’Ouest à chercher à importer à vil prix, via des filiales ad’hoc créées dans des pays de l’UE à basse réglementation sociale, « du » travailleur détaché intérimaire formé et en provenance d’un pays de l’UE à faible rémunération. Non que cette tendance soit utile ou bénéfique pour les peuples concernés aux deux bouts du système en question. Mais parce qu’il est possible que les déséquilibres sociaux induits par un tel virage à 180 degrés soient d’une ampleur bien plus grande et d’un effet plus durable que dans le cas actuel.
Espérons que les mêmes entreprises n’ont pas déjà prévu dans leurs plans stratégiques de réorienter massivement leurs efforts productifs vers l’Est et de reprendre le cours de la politique de désinvestissement à l’Ouest, et notamment en France, et de délocalisation, anticipant en cela le gain de productivé nouveau que leur permettrait la situation favorable créée par la conjonction de cette disposition de la directive travailleurs détachée révisée et d’une réforme du travail rendant les salariés français plus dépendants du bon vouloir de leur employeur.
A moins que cet espoir ne soit tout simplement voué à la vanité qui est celle de toute perspective fondée sur une vision naïve de la politique et de l’actualité.
En effet, se rappeler qu’il y a, à Bruxelles, au moins 7 lobbysites pour un parlementaire européen.
Mais on n’aura de toute façon, comme habituellement, que trop tard le fin mot de l’histoire. Rendez-vous sur cette même page dans 5 ans, et en attendant…
Wait and see…
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